Gamerz-Festival #09
Aix-en-Provence

du 10 au 20 octobre 2013
Festival des Arts Multimédia
Entrée libre et gratuite

M2F Créations

Isabelle Arvers

France


http://www.isabellearvers.com/


Machiniglitch


Le mot glitch est apparu en 1962 pour décrire une erreur ou un dysfonctionnement dans le cadre d’un programme spatial aux Etats-Unis. Le terme s’est ensuite largement répandu dans le domaine de la musique électronique des années 90. La notion de glitch s’apparente à l’idée d’accident, à la répétition, à la linéarité ou encore à la fragmentation pour reprendre les caractéristiques listées par Iman Morandi dans « Les esthétiques glitch » en 2004.


Que le glitch soit voulu par l’artiste ou totalement involontaire, la beauté naît de l’accident et de l’erreur. L’art du glitch consiste souvent à manipuler le médium, à triturer le code, la carte graphique, tout le « back stage » d’une image fixe ou animée et à voire ce que cela produit, suivant ainsi un mouvement entamé dans l’art vidéo par Nam June Paik avec le tube cathodique.


La beauté peut aussi naître de la multiplication des formes, de leur surimpression ou de leur démultiplication.


Le glitch vient remettre de la poésie là où l’hyper-réalisme aboutit à une représentation irréelle d’un réel loin d’être parfait. Le glitch vient rajouter de l’analogique dans le digital, il injecte de la « poussière » dans un code trop parfait.


Dans son texte, « L’art du bruit », Joseph Nechvatal insiste sur la nécessité de redonner de la complexité et de la granularité à ce qui est trop lisse, et en devient faux car irréel. Le glitch permet alors d’opérer une distance critique par rapport à un monde simulacre.


Les bugs, les accidents, les erreurs et les glitchs font partie intégrante de l’univers des jeux vidéo. La répétition comme les erreurs font partie de l’apprentissage. Il est impossible d’apprendre à jouer sans se tromper, sans répéter des dizaines de fois - voire bien plus - la même scène. IL en nait une frustration qui peut conduire au plaisir.


Le bug et le glitch renvoient encore au rapport que les joueurs entretiennent avec les jeux vidéo. Faire ce qui n’était pas prévu par les développeurs, détourner un objet de sa fonction initiale, aller au bout des limites du jeu, de la carte et de ses possibilités. C’est l’essence même du machinima, qui consiste à détourner le jeu de sa fonction première qui est de jouer pour le transformer ou un outil de conception de films.


Le glitch représente alors ce moment particulier où nous allons de l’autre côté du miroir pour regarder ce qui se cache derrière, entre les interstices.


Pour reprendre la théorie rhizomique chère à Deleuze et Guattari, il s’agit de révéler plusieurs niveaux de lecture, plusieurs niveaux de conscience, à aller dans les interstices de l’image et à révéler ce qui était caché de prime abord. Le glitch permet de rendre rendre visible ce qui est normalement invisible : le code, la mémoire RAM, le processus de production de l’œuvre, mais aussi tout ce qui se passe pendant la transmission d’une image, pendant son transfert d’un format à un autre.


Cette programmation de machinimas est un hommage à cette esthétique. Machiniglitch !