Gamerz-Festival #09
Aix-en-Provence

du 10 au 20 octobre 2013
Festival des Arts Multimédia
Entrée libre et gratuite

M2F Créations

Arthur Zerktouni

Tours, France


http://www.arthurzerktouni.net


In Memoriam, installation (projection vidéo interactive sur un écran d’eau), 2012.
Une production Le Fresnoy-Studio national


Il est des souvenirs fugitifs qui, si l’on ne prend garde de saisir leur silhouette imprécise au moment même où elle s’esquisse, s’évanouissent aussitôt pour disparaître à jamais.
Il est au contraire des souvenirs que l’on s’efforce d’effacer et qui demeurent indélébiles. À quel abîme intime, à quel lieu parfois irrémédiablement clos et néanmoins poreux ces images appartiennent-elles ? Où vont nos souvenirs enfuis, d’où ressurgissent ceux que l’on croyait oubliés ?


Antithèse absolue de la mémoire, l’oubli lui est pourtant nécessaire et en constitue le versant négatif, mystérieux, paradoxal. Réalités doubles et ambiguës, frontières et passages, la mémoire et l’oubli semblent les maîtres des temps intermédiaires. Du Perceval de Chrétien de Troyes abîmé dans la contemplation de trois gouttes de sang sur la neige qui, tout à son souvenir, oublie ce qui l’entoure, au Borges de L’Autre qui veut oublier sa rencontre avec son double passé pour ne pas perdre la raison, la mémoire et l’oubli mettent en jeu des temps où les frontières sont momentanément abolies.


Et là où il n’y a pas de frontières, il n’y a pas non plus de mot pour nommer l’insaisissable. Pourtant, cet entre-deux aux limites du réveil et du sommeil, du présent et du passé, du monde et du moi, auquel le Moyen Âge avait donné le joli nom de dorveille, est peut-être encore le nôtre, et plus souvent qu’on ne le croit – dans l’accomplissement de gestes mécaniques, dans l’attente, l’ennui, la rêverie, l’habitude.
Là où il n’y a plus de mots, il reste la représentation. In memoriam, qui met en scène le moment qui précède la disparition d’un souvenir, se propose comme une métaphore de cet entre-deux dans lequel on passe de la mémoire à l’oubli.
Si l’art, bien qu’il ne puisse s’y réduire, est aussi une trace, jouant à l’échelle de la mémoire collective le rôle du souvenir personnel, In memoriam n’est pas une trace. En conviant le spectateur à une dorveille collective, In memoriam se fait la trace – et sa disparition.


Chloé Chalumeau, doctorante en littérature médiévale (université Paris- Sorbonne)


Arthur Zerktouni, né en 1983 à Casablanca (vit et travaille à Tours), diplomé de l’ENSA Bourges en 2010 puis du Studio national du Fresnoy en 2012, il réalise des installations portant sur le temps et l’espace en privilégiant un travail plastique sur la lumière et le flux. On retrouve les éléments qu’il affectionne comme le fil fluorescent dans sa série d’installations Compositions presentée au Musee des Beaux Art de Tours (Limonaia 2012) ou lors de l’Efest de Tunis (Objet Son 2012). Mais c’est surtout l’eau, au coeur de son travail, qu’il expérimente d’abord avec son installation sonore Danae (Panorama 13 Le Fresnoy) puis avec In Memoriam, projet de fin d’étude au Fresnoy, qu’il qualifie de "monument à la memoire de l’oubli". Les créations d’Arthur Zerktouni se caractérisent par leur subtilité, leur préciosité et mettent en avant un univers immatériel et insaisissable.